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Pas de mosquée pour les musulmans d'Athènes

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Athènes est la seule capitale de l'Union européenne a ne pas posséder de mosquée officielle. Dès lors, les musulmans sont obligés de prier dans des lieux de culte improvisés : caves, sous-sols, entrepôts... Un reportage du portail South European Times.

15.07.2012 | 

 

Des musulmans prient dans le centre d'Athènes le jour de l'Aïd, à côté d'une affiche d'extrême droite contre la construction d'une mosquée, en 2010.

Des musulmans prient dans le centre d'Athènes le jour de l'Aïd, à côté d'une affiche d'extrême droite contre la construction d'une mosquée, en 2010.

Pour prier, les musulmans grecs utilisent des sous-sols, des cafés, des garages et d'anciens entrepôts, car, depuis des décennies, l'Etat bloque toute tentative de construire une mosquée officielle. Dans ces lieux de culte improvisés, ils font, de surcroît, souvent l'objet d'attaques de pyromanes et d'extrémistes de tout poil. "Chaque religion, y compris le bouddhisme, a son temple ici. Sauf nous, les musulmans", s'insurge Osama al-Najjar, 48 ans, employé dans le secteur pétrolier. "Si l'on veut suivre les préceptes de notre religion, nous sommes obligés de le faire dans l'illégalité. Pourtant, nous ne faisons rien de mal", poursuit-il.

Naïm Elghandour, 57 ans, est président de l'Association des musulmans de Grèce composée, selon ses dires, de 18 000 membres. Il affirme que depuis qu'il a quitté son Egypte natale, il y a près de quarante ans de cela, il n'a pas eu le loisir de prier dans une véritable mosquée. Pour accomplir les gestes rituels, il est obligé de se rendre dans l'une des 100 mosquées improvisées d'Athènes, comme cette cave sous l'épicerie tenue par l'un de ses amis, Mazen Rassas. "Ce n'est pas la même chose", dit-il. "Faute de reconnaissance officielle, nous n'avons pas non plus d'imam." A cela s'ajoutent les difficultés de logistique et d'entretien de ces lieux hors la loi. "Qui est suffisamment fou pour venir prier cinq fois par jour dans une cave ?" conclut Naïm Elghandour.

Une exception dans l'UE

La Grèce compte près de 500 000 musulmans, dont quelque 40 % vivent à Athènes. "Beaucoup d'entre eux sont des immigrés clandestins, ce qui ne fait que renforcer l'animosité à leur égard", explique Mazen Rassas. Depuis leur arrivée, les attaques racistes contre les immigrés se sont multipliées et les autorités ne cachent pas leur ambition de "nettoyer" Athènes de ces clandestins. Lors d'une enquête effectuée en 2011, plus de la moitié des interviewés se sont déclarés contre la construction d'une mosquée officielle. Ainsi, Athènes se trouve être la seule capitale de l'Union européenne a ne pas posséder d'un lieu de culte officiel dédié aux musulmans, un choix qui remonte à 1883, quand les Ottomans ont quitté la ville. Depuis, aucun gouvernement grec n'a donné son accord pour la construction d'une mosquée dans la capitale. Officiellement, l'Etat aide matériellement et financièrement les lieux de culte musulmans, mais uniquement dans les enclaves à forte population musulmane de Thrace, dans le nord du pays.

A Athènes, plusieurs lieux ont été pourtant pressentis pour accueillir une mosquée, mais, avec la crise économique et la réticence de la population – auxquelles s'ajoute la ferme opposition de l'influente Eglise orthodoxe – tous ces projets sont restés lettre morte. Avant les Jeux olympiques de 2004, la riche Arabie Saoudite avait même proposé de financer entièrement la construction d'une grande mosquée près de l'aéroport, mais le Saint-Synode grec a tout fait pour tuer ce projet.

Quelques signaux positifs

En attendant, les musulmans commencent à perdre patience. Il y a encore deux ans, un millier d'entre eux s'étaient rassemblés sur la place située devant l'Université d'Athènes pour une prière en plein air, mais ils avaient dû être protégés par pas moins de 7 000 policiers d'unités antiémeutes. Au mois de septembre de l'année dernière, des fidèles ont été pris pour cible pendant leur prière par des représentants du mouvement néonazi Aube dorée, qui a obtenu 18 députés aux dernières élections législatives. Mais on observe aussi quelques signaux positifs de la part de la classe politique grecque. Le maire de Thessalonique par exemple, Yannis Boutaris, ne cache pas son ambition de fournir une mosquée digne de ce nom aux 5 000 musulmans qui habitent dans sa ville. Ce dernier est aussi connu pour vouloir édifier un mémorial dédié au fondateur de la Turquie moderne, Kemal Atatürk, natif de Thessalonique.

A Athènes, les autorités réfléchissent aussi au projet de transformer une ancienne base navale à l'ouest de la capitale en lieu de culte officiel pour les musulmans, une idée qui est loin de plaire aux intéressés. "Personne ne nous a consultés pour ce projet", affirme Naïm Elghandour. D'autant plus qu'un lieu idéal existe déjà. Il s'agit de la Vieille Mosquée, un temple du quartier de Monastiraki datant du XVe siècle. Transformé en entrepôt, il fait aujourd'hui office de lieu de stockage pour des œuvres ou découvertes archéologiques qui n'ont pas trouvé place dans les musées nationaux.



17/07/2012
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