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Violences à Amiens. Des tensions anciennes avec la police

France

 

Faits de société mercredi 15 août 2012
 

 

 

Les violences urbaines survenues dans la nuit de lundi à mardi, dans les quartiers Nord d’Amiens, sont liées à des tensions anciennes et récurrentes avec la police, explique le sociologue Didier Lapeyronnie, professeur à l’Université de la Sorbonne-Paris IV. Entretien.

Ces violences urbaines sont-elles liées à une jeunesse désœuvrée en période estivale ou sont-elles spécifiques à Amiens ?

Visiblement, il y a une tension ancienne dans ce quartier avec la police. Il me semble qu’il y a eu déjà des incidents cette année ; il y en a eu l’année dernière, et en 2010, et beaucoup d’émeutes ont eu lieu dans ce quartier dans les années 90.

Ce genre d’incidents intervient dans des endroits où il y a des tensions fortes avec la police, récurrentes, installées, qui constituent presque une forme d’identité collective et qui se cristallisent à certains moments.

C’est un processus assez classique : une intervention policière qui est mal jugée, mal comprise ou mal interprétée, qui entraîne le déchaînement de violence. Ce que je constate c’est que depuis les émeutes à Villiers-le-Bel, on a quand même franchi un pas dans la violence émeutière, puisqu’on a utilisé des chevrotines, comme à Villiers-le-Bel.

S’agit-il d’une protestation sociale ?

Ce genre d’événements ne survient pas dans le Ve arrondissement de Paris. À l’évidence, il y a une dimension sociale, mais pas seulement. Tout ça s’inscrit dans un climat général de tensions sociales, mais aussi politiques et avec les institutions de la République, qui s’est installé et durci notamment en raison des politiques menées par le gouvernement précédent.

S’en prendre aux bâtiments publics, c’est extrêmement fréquent dans ce genre d’émeute. Les gens ont le sentiment que les institutions, l’école ou la police, se sont éloignées d’eux. C’était la même chose à Vaulx-en-Velin en 1990, ou en 2005. […]

Le problème est probablement de renouer les liens entre la population et la police, qui est souvent perçue comme un corps étranger qui se préoccupe peu de la sécurité des gens mais plus de les harceler ou de les ennuyer.

Est-ce que ces violences urbaines peuvent faire boule de neige ?

En général, c’est toujours le même processus ; ce genre d’incident (est) assez court et localisé […] : interventions policières, suivies d’émeutes et quelques fois de marches de protestation de la population. Ca n’excède pas quelques jours, si on pense par exemple au dernier grand événement similaire, dans le quartier de la Villeneuve à Grenoble, en 2010.

2007 était vraiment quelque chose de très particulier, avec une extension très forte des émeutes, qui étaient probablement le résultat de prises de positions politiques. Des hommes politiques et le ministre de l’Intérieur de l’époque avaient mis de l’huile sur le feu et induit cette généralisation. En général, s’il n’y a pas d’erreur politique, ça ne s’étend pas. Mais bon, c’est quand même quelque chose qui est installé dans notre paysage depuis une trentaine d’années maintenant.

Propos recueillis par Cécile AZZARO (AFP)



15/08/2012
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