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URBANISMEReconstruire La Nouvelle-Orléans avec des autocollants

URBANISMEReconstruire La Nouvelle-Orléans avec des autocollants

Comment rénover une ville et restaurer son âme ? En faisant participer les citoyens, bien sûr. Exemple à La Nouvelle-Orléans, où une initiative originale a été mise en place.

16.07.2012 |

 

La page d'accueil de Neighborland.com, une plateforme qui invite les citoyens à améliorer leur quartier en complétant la phrase : "Je veux ... dans mon quartier".

La page d'accueil de Neighborland.com, une plateforme qui invite les citoyens à améliorer leur quartier en complétant la phrase : "Je veux ... dans mon quartier".

Après le passage de l'ouragan Katrina, en 2005, La Nouvelle-Orléans était une ville détruite. Depuis, des entrepreneurs testent de nouvelles idées pour la reconstruire et la faire revivre. Parmi eux, la start-up Neighborland [Le pays des voisins] a monté un site de médias sociaux dont l'objectif est de collecter des idées pour améliorer un quartier. Il suffit de s'inscrire sur Neighborland pour trouver son quartier et poster ses idées. Tous les commentaires commencent par "Je veux...", à vous de compléter le reste.

Neighborland fait partie d'un nouveau genre de site et d'application conçu pour démocratiser les décisions concernant nos quartiers. Le projet existe aujourd'hui dans plusieurs villes américaines, notamment à Chicago, à Las Vegas et à New York. Mais tout a commencé à La Nouvelle-Orléans il y a un an.

Connecter le quartier

L'une des idées les plus populaires, à La Nouvelle-Orléans, est la mise en place d'une ligne de tramway qui passe par le centre-ville. Cette idée a été proposée par Jasmine Fournier, une jeune professionnelle de la santé qui possède une maison neuve sur l'avenue Saint-Claude, en plein cœur de la ville. La Nouvelle-Orléans a reçu des fonds fédéraux pour qu'une nouvelle ligne arrive jusqu'à l'avenue Saint-Claude, mais, pour Mme Fournier, il faudrait la prolonger. Elle pense en effet que les habitants du quartier se sentiraient mieux connectés, et qu'ils auraient moins l'impression que l'avenue n'est qu'un couloir de passage pour automobilistes pressés. "L'avenue Saint-Claude deviendrait un endroit où les gens descendent", explique-t-elle. "Et c'est comme ça qu'on a un vrai quartier, avec des gens qui s'y arrêtent."

Ce que Mme Fournier apprécie dans le site de Neighborland, c'est qu'il lui permet de s'impliquer sans assister à des réunions sans fin, ni perturber sa vie déjà bien chargée. Et c'est exactement ainsi que la cofondatrice Candy Chang voyait le site : un outil pour ceux qui n'ont pas voix au chapitre ou qui n'ont pas de temps à passer à la mairie. "J'ai l'impression qu'il y a de plus en plus d'outils qui permettent de contacter l'autre bout du monde, mais qu'il est encore difficile de toucher son quartier", explique Chang, qui est artiste et urbaniste. "Et si on aidait les gens à dire ce qu'ils veulent, où ils le veulent ?"

Neighborland est né d'un projet de street art de Chang. L'artiste a confectionné des autocollants avec l'inscription : "J'aimerais que ce soit...", puis elle les a placés sur la vitrine de boutiques vides pour que les habitants du quartier les complètent. "Les gens voulaient une boulangerie, une garderie, un stand de tacos, un endroit pour s'asseoir et bavarder", se souvient-elle. "J'aime beaucoup comment, dans ce petit espace [l'autocollant], les gens notent des réponses pratiques mais aussi poétiques. Certains ont écrit qu'ils aimeraient que ce soit le paradis ou la maison de Brad Pitt."

Parmi les commentaires les plus populaires sur le quartier de Bywater, où habite Chang, citons : "J'aimerais qu'il y ait un supermarché". Le seul supermarché de l'avant-Katrina n'a pas rouvert. Seules comblent le vide une boutique de produits de Mardi gras [nom du carnaval de La Nouvelle-Orléans] ainsi que la camionnette de M. Okra, à l'arrière de laquelle il vend des fruits et légumes. "Vous savez, après l'ouragan, nous nous sommes battus pour la communauté, il y a eu de nombreuses discussions sur les quartiers et l'urbanisme, et ce qui était réellement important pour nous", témoigne la conseillère municipale Kristin Gisleson Palmer. "Je crois que Neighborland reflète cela. Nous apposons vraiment notre sceau sur notre quartier."

Promoteurs réticents

Mais Neighborland, cette forme de démocratie participative, n'est pas facile à vendre aux promoteurs immobiliers, plus sensibles aux perspectives du marché qu'aux vœux des citoyens. A quelques exceptions près, comme la société Wisznia Architecture and Development. Elle a transformé le Saratoga, un vieil immeuble de bureaux situé à proximité de la mairie, depuis longtemps à l'abandon, en immeuble d'appartements. Au rez-de-chaussée, un écriteau demande : "Quels commerces voulez-vous ici ?" et indique un numéro auquel envoyer ses propositions par texto.

Dan Weiner, l'architecte de Wisznia, dit que la société a reçu des dizaines de suggestions pour les aider à "concevoir des idées sur la façon de transformer ces espaces en commerces et qu'elles présentaient un intérêt non seulement pour les promoteurs mais aussi pour la communauté".

Devant le Saratoga, à un arrêt de bus au coin des avenues Tulane et Loyola, les habitants voudraient des commerces et un restaurant. "On pourrait ouvrir une boutique de vins et spiritueux [dans le Saratoga], un magasin où je pourrais acheter une bière fraîche, je suis là tous les jours", propose Michael Ray, chargé de l'entretien des lieux, pendant qu'il attend le bus. Ray aime l'idée d'avoir un mot à dire dans l'urbanisme local mais, comme une part significative de la population de La Nouvelle-Orléans, il n'utilise pas les médias sociaux. "Je suis nul en informatique", déclare-t-il. Il n'a pas d'ordinateur et n'envoie pas de texto avec son téléphone portable. "On est quelques-uns comme ça sur terre, vous savez."



16/07/2012
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